• Elliott Erwitt, cet immense photographe nous a quitté.

    Birmingham, Angleterre, 1991. (ELLIOTT ERWITT / MAGNUM PHOTOS)

     

    Photographe américain d’origine européenne, Elliott Erwitt est parti -en cette fin du mois de novembre- il avait 95 ans.

    Son affaire, c'est la condition humaine qu'il traite souvent avec cet humour. « Je ne me lève pas le matin en me disant : je décide d'être drôle. Vous n'avez qu'à les regarder. Les choses sont drôles », disait-il.

    Il a su saisir comme peu d'autres des tranches de vie captées sur le vif avec un regard plein de malice et de fantaisie : des moments intimes, des moments de tendresse, des situations cocasses, décalées ou absurdes mais toujours avec un regard plein d'humour et d'humanité.

    Pilier de la prestigieuse agence Magnum où il est entré en 1954 sous la houlette de Robert Capa, Erwitt a l’œil pour repérer le comique de situation, il sait également provoquer la drôlerie. En témoignent ses autoportraits, tous plus désopilants les uns que les autres – avec perruques ou dans des situations loufoques -, confirmant que l’homme a aussi le goût de l’auto-dérision chevillée au corps.

    L’une de ses plus célèbres thématiques est celle consacrée aux chiens où ces derniers sont saisis avec un naturel et une drôlerie inégalée.

    Soit il fait des chiens l’égal des humains – un chien dressé sur ses pattes arrière, soit il cadre à hauteur de canidé, au ras du sol, offrant un point de vue décalé sur l’humanité.

    Pour photographier ces charmantes créatures, Elliott Erwitt a une botte secrète : il aboie, créant un effet de surprise. Souvent, l’animal sursaute et cela lui vaut une bonne photo. Autre ruse : les klaxons, dont il possède plusieurs exemplaires, qui fonctionnent aussi pour attirer l’attention des humains et détendre l’atmosphère, ils sont imparables pour faire dresser les oreilles des cabots. Ces derniers sont à ses yeux des modèles remarquables. "Les chiens sont des personnes incroyables. Ils sont charmants et surtout ils ne réclament pas de tirages", dira-t- il.

    Elliott Erwitt a une autre particularité : il refuse d’expliquer son travail. "Je veux que les gens réagissent émotionnellement à mes photos, pas avec le cerveau", dit-il. Certes, ses photos parlent d'elles-mêmes. Cependant, dans l'album de ce farceur, le flou règne souvent entre instantanés et mises en scène, ainsi certaine photo qu’on jurerait sortie d’une pellicule de Cartier-Bresson ou de Willy Ronis, sont parfois le fruit d’une mise en scène soignée.

     

    >> Elliott Erwitt déjà sur Parisperdu.

    >> Des autoportraits désopilants.

     


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  • Paris vu par… Jean Rouch (3/7)

    "Gare du Nord, Paris vu par…" un film de Jean Rouch, (1965)

     

    "Gare du Nord" est un court-métrage du réalisateur Jean Rouch, une fiction en quatre plans dont deux plan-séquence, d’environ 16 min, faisant partie du film "Paris vu par…" 

    Le film démarre par un panoramique, pris du haut des immeubles, et montrant les habitations alentours. Mais ce qui est très présent c'est le bruit des pelles mécaniques, des grues, des marteaux-piqueurs qui sature la bande son : Paris en 1964 est en pleine construction.

    C'est le matin, à l'heure du petit déjeuner d'Odile (Nadine Ballot) et de Jean-Pierre (Barbet Schroeder) : un jeune couple qui vit modestement dans le quartier de la Gare du Nord (Paris 10e).

    En plan séquence, dans la minuscule cuisine du 7ème étage, le couple s'assoit à la table, elle a préparé un œuf qu'il trouve trop cuit, il peste, elle lui reproche de faire des mouillettes comme un gamin. Mais surtout, Odile reproche à Jean-Pierre ce brouhaha, ce bruit intense et incessant dont elle n'en peut plus. Elle craint aussi que l'immeuble en construction cache la vue : la Tour Eiffel à gauche, le Sacré Cœur à droite. La dispute commence, les reproches sont lancés, les insultes fusent.

    Odile furieuse quitte alors l'appartement et descend par l'ascenseur. Là commence le deuxième plan séquence qui va se poursuivre jusque dans la rue de Maubeuge, près de la Gare du Nord où elle rencontre par hasard un inconnu (Gilles Quéant) qui abandonne sa voiture et la suit. Il lui propose une autre vie, de tout quitter, de partir vers une vie meilleure, ce dont elle rêve.
    Un dernier plan-court montre cet homme : il a sauté du pont et s'est écrasé sur les rails, et le film se termine sur Odile qui hurle de terreur et dont les cris se mêlent au vacarme des locomotives.

     

    >> Voir le film.


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  •  "Montparnasse et Levallois, Paris vu par..."  un film de Jean-Luc Godard, (1965)

     

    Monika est amoureuse de deux garçons en même temps, l'un est sculpteur sur métaux à Montparnasse (Paris 14e), l'autre est carrossier à Levallois-Perret (92).

    Elle envoie à chacun de ses deux amants un pneumatique pour leur donner rendez-vous, l'un Gare du Nord, et l'autre deux heures après, Porte d'Italie.
     
    Elle met les pneumatiques à la Poste mais juste après les avoir mis, elle s'aperçoit qu'elle s'est trompé d'enveloppe : à qui était destinée la lettre d'amour, et qui doit recevoir la lettre de rupture ? La lettre où il y a marqué "Paul mon chéri" n’est-elle pas dans l'enveloppe de Pierre et réciproquement !

    Alors, complétement affolée, elle courre chez le premier garçon, le pneumatique n'est pas encore arrivé. Monika lui dit : « Écoute mon chéri, tu vas recevoir un pneumatique, ne crois pas ce qu'il y a dedans ». Mais il lui demande des explications, elle est forcée de tout lui dire, finalement il la met à la porte quand il apprend qu'elle sort aussi avec un autre.

    Alors Monika se dit, j'en ai perdu un, je pourrais toujours garder l'autre. Elle traverse tout Paris et courre cette fois-ci chez le deuxième garçon, mais le pneumatique est déjà là !
    Le garçon n'a pas du tout l'air fâché, au contraire, alors Monika lui dit, « T'es gentil toi, tu me pardonnes ». Mais comme elle est quand même très étonnée de son attitude, elle lui raconte toute l'histoire. Alors brusquement le deuxième garçon la met aussi à la porte en lui montrant le pneumatique.
    La fille découvre alors, qu'elle ne s'était pas du tout trompé d'enveloppe.

     

    Ce film reprend l'histoire que raconte Jean-Paul Belmondo à Anna Karina dans le film de Godard « Une femme est une femme ».


    >> Voir le film (en 4 parties) :

    Part.1/4  : 4:01

    Part.2/4  : 3:23

    Part.3/4  : 3:46

    Part.4/4  : 3:46

     


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  • Paris vu par…

     

    "Paris vu par…" est un film collectif français à sketches, sorti en mai 1965. D'une durée totale de 92 minutes, il réunit les courts-métrages de six réalisateurs de la Nouvelle Vague. Chaque cinéaste y filme une histoire dans un quartier différent de Paris.

    Tous les films sont réalisés en 16 mm, format qui permet des tournages légers.
    Paradoxalement, ce film qui se voulait un manifeste de la Nouvelle Vague correspond à la fin de celle-ci comme mouvement organisé.

    Il était prévu que chacun des réalisateurs réalise ensuite un long métrage basé sur le même thème que celui qu’il avait choisi pour son court métrage.
    Ces longs métrages auraient été produit par « Les Films du Losange », la société fondée par Éric Rohmer et dirigée par Barbet Schroeder. Mais ce projet ne verra jamais le jour…

    6 billets à suivre pour chacun des courts-métrages.

     

    >> Image du générique du film.


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  • Sabine Weiss : ses photos transmettent ses émotions.

    Jardin du Luxembourg Paris, 1950 ©Sabine Weiss

     

    Elle a été sans doute la dernière grande représentante de l’école humaniste de la photographie française d'après-guerre. Sabine Weiss, née Sabine Weber en 1924, nous a quittés à la fin de l'année 2021, elle avait 97 ans… et 80 ans de prises de vue "derrière elle".

    Sabine Weiss démarre la photographie très jeune, parce que la manipulation chimique du développement l'intéresse ; son père est ingénieur chimiste.

    Genevoise d'origine, une peine de cœur la fait fuir à Paris en 1946. Elle y débarque au petit matin sans point de chute mais rapidement devient l’assistante du photographe de mode Willy Maywald. Trois ans plus tard, elle rencontre son mari – le peintre américain Hugh Weiss – et se lance comme photographe indépendante. Elle fait alors de tout : de la publicité, de la mode, du reportage et des portraits d’artistes.

    En 1950, elle fait le portrait de Miro, ce qui lui vaut un rendez-vous avec le directeur de Vogue. Elle dira : « Je suis arrivée avec mes photos de clochards et de morveux. Un monsieur assis à côté de moi, hochait la tête en disant : "Bien, bien". C’était Robert Doisneau. Je ne connaissais même pas son nom à l’époque. Tout de suite, il m’a proposé de rejoindre l’Agence Rapho. »

    Le fondateur de Rapho, Charles Rado, exporte alors le travail de Sabine Weiss aux Etats-Unis, où elle devient alors plus connue qu’en France.

    Sabine Weiss photographie beaucoup pour Vogue mais ce sont ses clichés en noir et blanc, des instantanés captés dans les rues de Paris, qui marqueront l’histoire de la photographie du XXe siècle.
    Sens de la composition, maîtrise de la lumière et de l'instant décisif, elle s’inscrit dans la lignée d’un Cartier-Bresson ou d’un Willy Ronis, les géants de la photographie française de l’après-guerre.  Plus tard, elle déclarera : « Je n’aime que les photographies prises dans la rue, au hasard des rencontres. » 

    Sabine a photographié surtout les gamins et les clochards des rues de Paris, les passants, les amoureux et les musiciens… avec une sensibilité et un talent formidable pour la composition.

    Sabine Weiss photographie pour transmettre des émotions et le revendique encore et toujours : "Je suis encore émue par tous ces visages, ces attitudes, ces atmosphères, ces solitudes, ces regards, ces baisers".

    Dans les années 1980, Sabine Weiss multiplie les voyages et se penche notamment sur la thématique des religions.
    Elle arrête la prise de vue à la fin des années 90 car, avec une épaule cassée, elle dit ne plus pouvoir tenir convenablement l’appareil… Elle se consacre alors à la gestion de ses archives.

    Bien que naturalisée française en 1995, c'est au Musée de l’Elysée, à Lausanne qu'elle fera don de son œuvre photographique : 200 000 négatifs, 7000 planches-contacts, quelque 2700 tirages vintage et 2000 tardifs, 3500 tirages de travail et encore 2000 diapositives… eh oui, 80 années de déclics !

    Merci Madame !

     

    >> Sabine Weiss, page officielle.

    >>"Sabine Weiss : Un regard sur le temps", un film de Lily et Jean Pierre Franey 

     

     

     


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