• C'est à l'angle de la rue Julien Lacroix et de la rue du Sénégal, que je fais la rencontre de Fari et d'Aduna, sa petite fille.

    Fari est arrivée à Paris dans les années 80. Son père Mamadou, qui avait travaillé près de 20 ans à l'usine Renault de Flins, bénéficia alors des lois sur le regroupement familial et pu ainsi faire venir en France sa femme et Fari, leur fille cadette. Leurs deux autres enfants resteront chez un oncle à Dakar. Sa femme ne s'acclimatera jamais à la vie européenne. Rapidement elle tombe malade et meurt moins de 10 mois après son arrivée à Paris.

    Aujourd'hui, Fari est mariée à un malien et Aduna est leur fille de 4 ans. Fari et son mari travaillent dans une entreprise de services en "entretien et propreté", tous deux sont des "immigrés réguliers".

    Pourtant, souvent Fari s'interroge sur la place réelle des immigrés dans la cité ? Car si au regard du logement, du travail, de la scolarisation des enfants et aussi en matière de santé, les textes applicables sont les mêmes pour tous, ces textes ne suffisent pas toujours à éliminer nombre de pratiques discriminatoires dans l'accès au travail et au logement social.

    Et là, à l'angle de la rue Julien Lacroix et de la rue du Sénégal (une rue où pourtant elle pourrait se sentir un peu chez elle !) Fari nous confie les difficultés qu'elle a eu pour trouver un emploi stable ... Mais si, elle et son mari y sont enfin parvenus, ils leur restent aujourd'hui à franchir l'obstacle du logement.
    L'appartement de la rue de la Mare où loge la famille est insalubre et le loyer exorbitant. Fari a appris que ce coin de Belleville va être entièrement reconstruit et que des logements sociaux y sont prévus en grande quantité. Alors, accompagnée d'Aduna, elle vient, ici, faire le tour des bureaux de vente, juste pour voir, juste pour rêver un peu devant les cuisines toutes équipées et les salles de bain luxueuses des appartements-témoins ...

    Mais, même si Fari signifie "la reine" (en wolof), ces futurs appartements "royaux" ne seront pas pour elle ...
    Heureusement, elle a la vie "devant elle", et même plus exactement "avec elle", ... puisqu'en wolof le prénom de sa fille Aduna, signifie "la vie"!


    >> Egalement sur Parisperdu: "Passage Goix : une voie sordide" ou la vie à Paris d'une autre famille sénégalaise.

    >>  Voir aussi sur Parisperdu : "Apartheid résidentiel"

     


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  • Quartier Masséna, aux confins de la Seine, des voies ferrées d'Austerlitz et du boulevard périphérique Est: dans un no-man land, la dernière maison encore debout.


    Dans un 13ème arrondissement autrefois sinistré, et aujourd'hui souvent sinistre, que va devenir le quartier Masséna ?
    Espérons que pour une fois, les architectes feront preuve d'humilité et de modestie, au lieu de nous exposer leurs délires qui - à coup sûr - déstructurent le tissu social et maltraitent la vie locale.

    En entourant leurs projets d'un écran de fumée verbeux, tels que: "îlot ouvert, bocage urbain, magie architecturale, vision contemporaine" (sic): c'est tout un langage creux et prétentieux qui est souvent mis en avant pour "vendre" le projet !
    Ils se prennent pour des démiurges, et toute critique est perçue comme rétrograde et passéiste, selon un discours terroriste maintenant bien rodé. Mais jamais ils n'iront vivre ni travailler là où ils ont créé ...

    Les premières esquisses du futur quartier Masséna font, en effet, craindre le pire. En faisant fi de l'esprit du lieu, du caractère spécifique de son tissu urbain, de ses infrastructures, de son rôle charnière avec le vieux 13ème (quartier Chevaleret), il n'est pas du tout sûr que "Ce sera mieux après" !

    Quand on voit le désastre de la bibliothèque François Mitterrand - une architecture glaciale, où les livres sont au grenier, les lecteurs à la cave, et le jardin derrière des barreaux ... et avec tout près, la fameuse avenue de France, organisée sans queue ni tête (au propre comme au figuré) et surchargée en bureaux aux dimensions brutales ... on peut redouter que le désastre ne se répète pour le quartier Masséna.

    Alors faut-il prôner un retour au modèle haussmannien de Paris ?

    Cela  relève sans doute pour certains d'un "obscurantisme grincheux" dénoncé par le fameux: "C'était mieux avant".
    Acceptons l'injure et constatons simplement que les tissus urbains qui fonctionnent bien (avec des transports, des services publics, des commerces, etc.) et où l'on se sent bien (Paris, Rome, certains quartiers de Londres, Washington ...) correspondent grosso modo à ce modèle: même aspect des rues avec des immeubles de 6 à 8 étages, un COS de 3 à 4, un "mix" d'habitat et de commerces. Le rejeter, c'est refuser la réalité.

    Aussi, faudra-t-il qu'un jour, les urbanistes et les sociologues prennent le pas sur les architectes et leur montrent que le développement urbain doit apporter du sens à notre société ... et qu'on ne dessine pas notre cadre vie comme une robe de haute couture !!!
    On va finir par regretter le sordide 13ème d'il y a 20 ans...


    >> Le projet de l'architecte Demians pour le quartier Masséna, dans le XIIIe arrondissement. (Photo: ©Mairie de Paris)


     

     

     


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  • Destruction de la rue Vilin - Photo ©Philippe Hiraga


    Durant l'été 1971, Philippe apprend que le quartier de Belleville risque de disparaître. Aussitôt, il s'y rend pour prendre quelques photos.

    Il faut dire qu'il n'est pas insensible aux transformations que subit alors le quartier ... "En fait, - nous dit Philippe - je suis allé sur les traces de mon père qui était artiste-peintre et avait peint, ici, plusieurs toiles entre les années 20 et les années 50 ... et où durant mon enfance, je l'ai souvent accompagné."

    Mais quand Philippe arrive rue Vilin, la destruction de la rue est déjà bien avancée, et ... les maisons tombent les unes après les autres, dans le vacarme des engins mécaniques et sous une poussière qui vous pique les yeux.

    Aujourd'hui, il ne reste rien de la rue Vilin ... et pourtant les yeux nous piquent encore. Ce n'est plus la poussière mais, à la vue des  clichés de Philippe, ce sont les souvenirs qui nous mouillent les yeux.



    >> Voir aussi sur Parisperdu: Vilin, Couronnes, Pali-Kao.

     


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  • La porte de Bagnolet rassemble des bureaux à faible valeur architecturale, des hôtels sans étoile, peu de programmes de prestige et ... même son centre commercial, "Bel-Est", fait pâle figure, à tel point que certains continuent de qualifier Bagnolet de "Défense du pauvre".
    Ce sinistre décor, tous les Parisiens le connaissent, pour y être passés ... à 80 kilomètres/heure. Mais n'ont-ils jamais osé s'aventurer sous le périph ?

    Car là se trouve tout ce qu'il y a de plus dégoûtant: des zones entièrement délaissées, souvent sans lumière, pas vraiment sécurisées et avec des allures de décharges ... On y trouve aussi des campements de fortune de "sans-papiers" ... bulgares, afghans ou même de SDF ... bien français, qui tous survivent ici dans un environnement dominé, de nuit comme de jour, par le vacarme assourdissant des voitures, des poids lourds et par leurs émissions de gaz nocifs ...

    Pendant des années, personne ne s'est posé de questions sur l'avenir de cet anneau infernal de 35 kilomètres de circonférence, sur ce non-espace dans la ville. Dès les années 1980, architectes, urbanistes et élus réfléchissent pourtant déjà aux moyens de le réhabiliter. Mais le débat tourne en rond...
    En 2003 toutefois, la publication du livre des membres du cabinet "Tomato Architectes", intitulé La Ville du périphérique, va agir comme un détonateur.

    A présent, au-delà des débats sur la vitesse autorisée, sur le passage des poids lourds, sur une éventuelle file pour les taxis, autant de débats qui ont animé - faiblement - la dernière campagne des municipales, la question du périphérique devrait s'articuler autour de la relation entre Paris et sa banlieue.
    Car sans réaménagement du périph, sans réflexion sur la manière de le traverser, comment ouvrir et transformer les quartiers de la couronne parisienne?

    Vous avez dit "Grand Paris" ? Oui, grand pari ...


    >> "La Ville du périphérique" par le cabinet Tomato Architectes.

    >> "Périphpolis", un film de Joachim Lepastier.


     

     


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  • Le quartier Olympiades, Paris 13ème.


    Alors que Paris manque cruellement d'espaces verts, qui pourtant seraient si nécessaires au bien-être et à la santé des Parisiens, on parle de vouloir construire des tours dans les rares lieux non encore bâtis de Paris.
    Ne marche-t-on pas sur la tête ?

    Les problèmes de nos banlieues - nées des barres et des tours - ne suffisent-ils pas ? Pourquoi donc vouloir encore plus de monde à Paris alors que, déjà chaque jour, plus d'un million de personnes passent par le métro Châtelet, lequel est plus que saturé ... et qu'en plein après-midi, la rue de Rivoli atteint des pics de pollution insensés ...

    Si New York doit rester New York, avec ses tours, Paris doit rester Paris, avec ses immeubles Haussmanniens, qui jamais ne dépassent 6 étages.

    Dans les nouveaux quartiers de la Grande Bibliothèque ou de Bercy, où l'on a gommé les petites rues, les maisons, les jardins et la vie tout autour, allez maintenant vous y promener le soir ... Bonjour l'ambiance coupe-gorge : boutiques vides ou fermées dès 19 heures, zones désertes, façades d'immeubles glaciales ...
    Ces nouveaux quartiers sont franchement invivables.

    C'est "l'architecture du moi" qui prime, à la place de "l'architecture pour les autres". Les architectes qui conçoivent ces tours, les politiques qui décident de les construire ont-ils l'intention d'y habiter ?

    Des tours à Paris, mais pour quoi faire ... ?


    >> Voir aussi : Des tours à Paris : pour quoi faire ? (1/2)

    >> De nouvelles tours à Paris, les propositions de 11 architectes.


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