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    Photo: ©Jean-Louis PENEL

     

    Jean-Louis est un garçon discret, pendant toutes ces années où j'ai travaillé avec lui, nos échanges sont restés strictement professionnels. Jamais il ne m'a parlé des reportages extraprofessionnels qu'il avait pu réaliser au cours de sa déjà longue carrière.

    Et voilà qu'aujourd'hui, je découvre qu'il vient de monter, avec le soutien de la Banque Populaire une exposition de ses photos sur Belleville. Le Belleville des années 70, celui d'avant la grande restructuration de ce quartier de l'Est parisien qui m'est si chaud au cœur.

    Quand je demande à Jean-Louis pourquoi il ne m'a jamais parlé de ses escapades photographiques, il me répond par cette boutade: " Je n'avais pas envie que l'on me prenne pour un artiste !"

    Alors artiste ou pas artiste ?
    A vous de juger, en parcourant, ici, son parcours photographique dans les rues de Belleville, … en 1971.

    Merci à toi, Jean-Louis … et continue à nous montrer ton talent.

     

     


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  • Crédit photo ©: Association Aurore.

     

    Trois jours par semaine, Aziz déballe quelques frusques porte Montmartre, dans le 18e arrondissement. Il dispose d’un emplacement sur le "Carré des biffins", à deux pas des puces de Saint-Ouen. Un marché d’infortune, situé sous un pont du périph, où s’entassent, entre les piles de béton et les voies de circulation, des hommes et des femmes condamnés à la débrouille. Une foule d’anonymes plongés dans la précarité, et qui n’ont d’autre choix que de vendre ce qu’ils ont pu dégoter.
    Aziz vend des vêtements, des chemises surtout, "c'est le plus facile à transporter" dit-il.

     

    Les biffins – un nom tiré d’un mot de vieux français désignant les étoffes et par la suite, les chiffonniers - ont toujours exercé dans le quartier, comme leurs ancêtres le faisaient il y a cent ans dans la "zone", sur les anciennes fortifications, pour - eux aussi - se sortir de la mouïse. Ces dernières années pourtant, le phénomène a pris une ampleur inédite. Jusqu’à mille vendeurs à la sauvette arpentaient chaque jour les abords de la porte Montmartre.

    D’autres venaient y chercher ce qu’ils ne pouvaient se payer ailleurs, vêtements ou nourriture en particulier. Les descentes quotidiennes de la police ou les protestations de riverains excédés n’y ont rien changé. Face à cette réalité devenue ingérable, la mairie de Paris a fini par en autoriser la pratique, à titre expérimental, et uniquement les samedis, dimanches et lundis - jours d’ouverture des Puces de Saint-Ouen.

    Une centaine d’emplacements, numérotés et matérialisés au sol à coups de peinture blanche, ont ainsi été créés. Seuls peuvent en bénéficier les habitants des 18e et 19e ainsi que les habitants de Seine-Saint-Denis.

    La gestion de ce projet a été confiée à l’association Aurore, spécialisée dans la réinsertion. L’association s’est très vite retrouvée confrontée à une explosion des demandes, certains assimilant même le "carré des biffins" à un vide-grenier. Et aujourd’hui, près de 270 biffins sont inscrits et se relaient en fonction des places disponibles.

     

    On est lundi, et Aziz espère avoir à nouveau une place sur le Carré samedi ou dimanche prochain … pour lui c'est quasiment une affaire de survie.

     

     

    >> L'association Aurore sur Facebook.

     

     

     

     

     


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  • 7 rue Robineau - Paris 20ème

     

    " Un jour, … c'est la maison entière qui disparaîtra, c'est la rue et le quartier entier qui mourront. Cela prendra du temps. Au début cela aura l'air d'une légende, d'une rumeur à peine plausible : on aura entendu parler d'une extension possible du parc …, où d'un projet de grand hôtel … Puis les bruits se préciseront; on apprendra le nom des promoteurs et la nature exacte de leurs ambitions que de luxueux dépliants en quadrichromie viendront illustrer.


    Mais avant que ne surgissent du sol ces cubes de verre, d'acier et de béton, il y aura la longue palabre des ventes et des reprises, des indemnisations, des échanges, des relogements, des expulsions. Un à un les magasins fermeront et ne seront plus remplacés, une à une les fenêtres des appartements devenus vacants seront murées et les planchers défoncés pour décourager les squatters et les clochards. La rue ne sera plus qu'une suite de façades aveugles – fenêtres semblables à des yeux sans pensée – alternant avec des palissades maculées d'affiches en lambeaux et de graffiti nostalgiques.

     

    Qui, en face d'un immeuble parisien, n'a jamais pensé qu'il était indestructible ? Une bombe, un incendie, un tremblement de terre peuvent certes l'abattre, mais sinon ? Au regard d'un individu, d'une famille ou même d'une dynastie, une ville, une rue, une maison, semblent inaltérables, inaccessibles au temps, aux accidents de la vie humaine, à tel point que l'on croit pouvoir confronter et opposer la fragilité de notre condition à l'invulnérabilité de la pierre. Mais la même fièvre qui, vers mille huit cent cinquante, aux Batignolles comme à Clichy, à Ménilmontant comme à la Butte-aux-Cailles, à Balard comme au Pré-Saint-Gervais, a fait surgir de terre ces immeubles, s'acharnera désormais à les détruire.

     

    Les démolisseurs viendront et leurs masses feront éclater les crépis et les carrelages, défonceront les cloisons, tordront les ferrures, disloqueront les poutres et les chevrons, arracheront les moellons et les pierres : images grotesques d'un immeuble jeté à bas, ramené à ses matières premières dont des ferrailleurs à gros gants viendront se disputer les tas : le plomb des tuyauteries, le marbre des cheminées, le bois des charpentes et des parquets, des portes et des plinthes, le cuivre et le laiton des poignées et des robinets, les grands miroirs et les ors de leurs cadres, les pierres d'évier, les baignoires, le fer forgé des rampes d'escalier …

     

    Les bulldozers infatigables des niveleurs viendront charrier le reste : des tonnes de gravats et de poussière."

     

    Georges Perec: "La vie mode d'emploi" Chapitre XXVIII "Dans l'escalier, 3"

     

     

     

    >> Souvenir de la rue Vilin, par Georges Perec.

    >> Parisperdu et les démolitions urbaines.




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    Photo: © AFP

    Les Chinois de Belleville sont descendus dans la rue.
    Le 20 juin 2010, plus de 10 000 personnes, majoritairement d'origine asiatique, se sont rassemblées pour protester contre l'insécurité qui gangrène le quartier. Sur les banderoles déployées et les tee-shirts édités spécialement pour l'occasion, de nombreux slogans consensuels: "Sécurité pour tous", "Belleville quartier tranquille", "Halte à la violence" ou encore "J'aime Belleville".

    Cela fait des années que les Chinois, selon leurs dires, subissent la loi des bandes ultraviolentes qui écument les quatre arrondissements de Belleville (Xe, XIe, XIXe et XXe). Mais pourquoi s'en prendre plus particulièrement aux Chinois?

    C'est que les Chinois constituent une proie idéale pour des bandes de jeunes désœuvrés, de plus en plus mobiles et organisés. Ces derniers comptent tout simplement sur le fait que certains, étant en situation administrative irrégulière, ne peuvent avoir de compte en banque, et perçoivent donc leur salaire en espèces. Sans papiers, ils ne vont pas aller porter plainte auprès de la police... les voilà donc placés au rang de victimes idéales que l'on peut dépouiller presque sans risque.

    Mais ces voleurs cherchent d'abord l'argent facile, c'est tout. Ils ne ciblent pas les Chinois parce qu'ils sont Chinois. Il ne faut pas tout confondre. Il n'y a pas de guerre ethnique à Belleville. Cependant, cette situation est bien triste pour le quartier de Belleville où les trois communautés juives, maghrébines et chinoises ont, depuis toujours, vécu dans la paix et la bonne entente.

    Aujourd'hui, prise en otage par des bandes de jeunes ultraviolentes, la population de Belleville, le quartier parisien aux 80 nationalités, vaudrait bien retrouver la sérénité.


    >> Violences/Belleville: 13 bandes identifiées.

    >> "Chinoiseries à Belleville".

    >> Belleville, de la déliquescence à la délinquance.

     

     

     


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  • Angle de la place Martin Nadeau et de la rue Robineau - Paris 20ème.


    Le 20ème est un arrondissement à part. Terre d'asile, depuis deux siècles, de générations d'ouvriers, souvent immigrés, il est représentatif de l'Est parisien: populaire et cosmopolite. Il offre encore parfois l'illusion de la campagne à Paris et son passé communard lui prête une certaine aura révolutionnaire, qui attire à lui une nouvelle classe moyenne éprise d'anticonformisme.

    Pour son arrondissement, son maire formulera une maxime : "La mixité sociale est son génie et son avenir".
    Pourtant, les problèmes de l'arrondissement restent ceux des quartiers ouvriers. La cité Saint-Blaise - la plus forte densité démographique d'Europe - en offre un concentré: 15% de ses occupants vivent au-dessous du seuil de pauvreté, 18% sont chômeurs et 25% sont des travailleurs précaires.
    Ici, les médecins réfléchissent à deux fois avant de poser leur plaque, ce qui explique la peu glorieuse 20ème place de l'arrondissement pour l'offre de soins à Paris.

    Au coeur de l'arrondissement, Ménilmontant, le quartier populaire-type, est malheureusement de plus en plus défiguré par le modernisme ambiant et ces façades sont les derniers et fragiles témoignages d'une civilisation emportée par le vent du changement ... qui pointe le nez là-bas, juste en haut de la rue Gasnier-Guy.


     

    >> Voir aussi à la recherche du Parisperdu, celui des jeunes filles en fleurs ...


    >> "Le vent du changement pointe son nez, en haut de la rue Gasnier-Guy ..."






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