• Passerelle sur les voies ferrées de la Petite-ceinture - rue de la Mare Paris 20ème


    Non, Paris n’est pas une ville musée. Cette balade alternative va vous prouver que l’on peut aujourd’hui se balader dans la "ville lumière" sans y voir l’ombre d’un touriste.
    Alors, prenez des notes !

    C'est une déambulation originale dans le 20ème arrondissement qui vous est proposée, une balade qui se donne l'objectif d'explorer les secrets de la ville et, loin des sentiers battus, d’aller à la rencontre de ses habitants.
    Un Paris cosmopolite, insolite, fait de cours intérieures et de coins cachés va s'ouvrir à vous.
    Surtout prenez le temps d’ouvrir les yeux et, à la fin de la balade, il est certain que vous verrez Paris différemment …

    Point de départ: la rue Piat, dans le 20ème, précisément à son belvédère où tout Paris s'offre à vous : le point de vue est aussi bluffant que du haut du Sacré-Cœur de Montmartre, avec la foule en moins et sans les vendeurs de pacotilles touristiques.

    De là, cap sur la villa Castel, un endroit secret où le parfum de "Jules et Jim" flotte encore.
    Puis dévalez le passage Plantin, étroit à souhait, son ombre et sa fraîcheur sont délicieuses en plein été. Vous débouchez alors dans la rue des Couronnes, à l'endroit exact où Willy Ronis nous a proposé une vue de l'intérieur d'un bar  - aujourd'hui disparu -  avec une jolie perspective vers la clocher de Notre-Dame de la Croix. En face, la cité Loubeyre vous attend, avec ses anciennes manufactures de chaussures, une des activités de pointe du Belleville des années 50.

    Direction rue de la Mare, vous la descendrez pour arriver à la passerelle métallique qui enjambe la voie ferrée de la Petite Ceinture : un lieu plein de charme mais dont la vie s'est retirée depuis que la gare de Ménilmontant a été rasée.

    En remontant vers la rue de Ménilmontant, une nouvelle perspective s'ouvre à vous, avec en contrebas, la tour Eiffel, si loin, comme dans une autre ville, mitoyenne peut-être …

    Par la rue des Amandiers, dans un secteur modernisé, sans grand charme, il vous faudra chercher votre chemin vers Gambetta. Les rues des Partants et Gasnier-Guy, très pentues ont longtemps résisté à leur inéluctable réhabilitation, elles vous permettront d'atteindre la place Martin-Nadeau qui conserve encore un aspect provincial, près du petit tertre du "Square du Docteur Grancher" sur lequel se tenait le micro-quartier de la rue de la Cloche, aujourd'hui disparu.

    Vous aurez alors bien mérité de prendre un verre à la terrasse d'un café de la place Martin-Nadeau… à moins que vos forces vous permettent encore de pousser jusqu'au Père-Lachaise, tout proche …

    A l'issue de cette balade, vous aurez découvert un petit monde, une sorte de "quatrième dimension", comme un univers nouveau et étrange … mais pour lequel on se prend vite d'affection …


    >> Déjà sur Parisperdu: "Paris n'est pas un musée".

    >> Déjà sur Parisperdu: "Partez en voyage …".

    >> Déjà sur Parisperdu: "Balade hors des sentiers battus ...".

    >> Carrefour de la rue des Couronnes et de la rue Henri Chevreau - 1947 - Photo: © Willy Ronis

      


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  • La place des Fêtes,  juin 2008 -  Paris 19ème


    Les hautes tours de la Place des Fêtes, esthétiquement très médiocres, délivrent un paradoxe: même "reconstruit" le quartier conserve un caractère villageois et des qualités certaines de convivialité … que n'ont généralement pas les espaces situés au pied des tours ou des barres d'habitation.

    C'est qu'ici, à la différence des quartiers à problèmes de la banlieue Nord, par exemple, la population de la Place des Fêtes n’a, elle, pas de problèmes sociaux importants ; ses tours ont une superbe vue sur Paris et elles sont bien reliées au centre ; le quartier est parfaitement équipé ; et l’ambiance y est forcément beaucoup plus légère.

    Mais ce résultat, qui est d’abord le fait  des habitants eux-mêmes, n’existerait sans doute pas si ceux-ci ne pratiquaient pas, à l’intérieur de leurs tours, une convivialité certaine et somme toute assez rare dans ce type d’habitat.
    Alors, du fait de cette convivialité, l’opposition initiale entre "les gens des tours" et les anciens habitants du quartier s’est rapidement estompée. Et s’il y a bien un repérage des "tours des riches" par les riverains vivant en HLM près de la Place des Fêtes, ce n’est pas la forme architecturale qui le permet — toutes sont plutôt laides — mais la fréquentation de leurs habitants dans l’espace public.

    Au final, la vie dans les tours offre, outre l’avantage de ne plus les voir du dehors, maints avantages fonctionnels … Et le discours entièrement négatif sur la Place rénovée a toujours été le fait de non-riverains de la Place.

    Un petit tour Place des Fêtes est pour le non-résident une expérience à double détente : passé le premier "choc visuel", l'agrément du lieu vient peu à peu à vous … au fil des rencontre avec ses habitants.

     

    >> La place des Fêtes, déjà sur Parisperdu

    >> Voir aussi : "Ce n'est pas vraiment la fête ... !"

    >> La Place des Fêtes : quelle place ? Quelles fêtes ? (1/2)
     

     

     


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  • La place des Fêtes,  novembre 2009 -  Paris 19ème

    En 1974, peu après son élection, Giscard d’Estaing attaque la politique des grands ensembles, en déclarant:"On a construit ou laissé construire des ensembles d’inspiration collectiviste, monotones et démesurés, qui ont sécrété la violence et la solitude. Rétablir la communication sociale interrompue par le gigantisme et l’anonymat sera une tâche majeure de notre société ".

    Les trente années qui suivirent donneront largement raison à Giscard d’Estaing, du moins concernant les "grands ensembles" en général.
    Mais, Place des Fêtes, au pied de tours de 26 étages, il semble bien finalement avoir eu tort, tant le démarrage fut difficile. Quand ces tours furent construites vers 1975, on hurla à l’assassinat d’un quartier et d’une culture populaire … et les tours, maudites, restèrent vides pendant trois ans.

    Mais aujourd’hui, la Place des Fêtes apparaît à ses habitants, comme un lieu qui se prête à la vie de village et l’image qu’en renvoient ses habitants est bien différente de celle à laquelle pourrait s’attendre le flâneur égaré au milieu des tours et des barres de béton.

    Place des Fêtes, on promène son chien, on rencontre des amis, on s'arrête deux minutes pour discuter avec l’un ou avec l’autre, tant il est rare que l'on traverse la Place sans rencontrer quelqu’un de connaissance.

    Il n'est pas sûr qu’il y ait beaucoup de places dans Paris comme celle-là. Ici, on a gardé le côté populaire du 19ème, un arrondissement qui a toujours été comme cela, avec des gens qui respirent la simplicité et le naturel.

    Et ceci est d’autant plus remarquable que de l’avis général il n’y a pas à cet endroit de "vraies fêtes", ni d’ailleurs de "vraie Place" : tout le mérite du lieu tient à ce qu’il focalise la volonté de tous pour que le mythe de Belleville vive, sinon Belleville mourrait, et Belleville, on y tient …

    A suivre.

     

    >> Voir aussi : "Mon point central c'était la Place des Fêtes".

     

     


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  • © Photo: Centre Social et Culturel J2P 

     

    Dans la sphère bellevilloise, les associations de quartier ont de, tout temps,  joué un rôle important.
    Dès la fin du XIXe siècle, la vie associative a été très riche à Belleville, avec les communautés ouvrières, puis cela a perduré avec les strates successives d’immigration: juifs ashkénazes, grecs et arméniens fuyant le génocide de 1915 ; espagnols antifascistes en 1939 ; et, après-guerre, celle des pieds-noirs et des juifs séfarades entraînant des musulmans qui leur étaient liés ; enfin l’immigration économique des portugais, yougoslaves, chinois et vietnamiens, maghrébins et africains.
    Belleville est une véritable mosaïque de nationalités, et beaucoup de ces communautés avaient et ont encore des associations d’entraide.

    Autre période aiguë, celle de la rénovation urbaine qui suscita l’apparition de mouvements de défense des habitants anciens, puis d’intégration des habitants nouveaux.

    Dans le Bas-Belleville, La Bellevilleuse a été d’une grande efficacité militante dans le domaine du logement et de l’exclusion.

    Un peu plus haut, l’association de la Place des Fêtes a fini par regrouper une vingtaine d’associations de quartier aux activités très diverses.
    Cette association fut l'un des protagonistes des luttes féroces - entre les riverains et les commerçants d’une part et la Ville, d’autre part - à propos de la "rénovation" de l’ancienne Place des Fêtes.

    La mairie d’arrondissement ayant demandé un seul interlocuteur pour traiter la question des équipements de quartier, le Groupement des Associations de la Place des Fêtes fut alors créé. Cela n’a pas empêché les commerçants de jouer au maximum leur rôle de "groupe de pression", ni la mairie du 19e de favoriser des expressions complémentaires, voire opposées.
    Mais la Ville de Paris refusa que les associations fassent partie du jury d’architecture, ceci constituant à ses yeux "un précédent dangereux". Aussi les associations publièrent dans le journal local "Quartiers Libres" leur propre classement des six projets retenus par le jury : le projet lauréat de la Ville, venait, pour elles, au troisième rang … !

    Suite à ce conflit, les élus de l’arrondissement et les directions de la Ville n’ont cessé de réduire, en face du projet, l’influence du Groupement, qui a pris à partir de 1991 une direction différente et qui l’a amené à œuvrer dans d'autres domaines : l'emploi, l'animation ...

    A Belleville, la vie associative fait définitivement  partie du décor …



    >> "Mon point central c'était la Place des Fêtes"

    >> La Bellevilleuse.

    >> Belleville: "East side story " (3/4)



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  • A Belleville, la prégnance de sa légende a viré au mythe. Pour un habitant de Belleville, il est clair qu'il peut se sentir "d'ici" même si en fait il vient de tout à fait ailleurs, et que ce sentiment a tout à voir avec l’adhésion à l’histoire, vraie ou mythifiée, de ce quartier, dès lors que l’identité de ce lieu est reconnue comme une valeur.

    Pierre Sansot définit l’habitant comme celui qui adhère au mythe de sa ville. Cette problématique intègre le rejet éventuel de l’identité trouvée à la naissance, et la "réaffiliation" à une identité consciemment choisie contre ces origines.

    Mais, parce qu'il est souvent cité comme le "modèle français d’intégration pluriethnique", Belleville semble être beaucoup moins un mythe qu'une réalité,  tant il a bel et bien réussit là où les ghettos échouent.
    Ce succès est dû au respect général de la maxime selon laquelle "la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres", et aussi à un  mécanisme plus secret qui rend possible à cet endroit ce qui s’avère impossible ailleurs : la re-identification - à travers des bribes d’histoire mythifiée - à une légende fondatrice qui fait de Belleville un "quartier d’opposition".

    Souvent simplement d’opposition à la tendance politique dominante du moment, mais plus subtilement de méfiance et d’opposition instinctive aux idées et aux façons d’être dominantes de l’époque, quelle qu’elle soit. Et c’est justement cela qui attire "les exclus".

    Le "modèle bellevillois" d’intégration sociale des immigrés successifs — dont l’histoire est déjà longue — reposerait donc sur la facilité de transition offerte par l’identité rebelle bellevilloise aux immigrants. Ceux-ci, pour s’intégrer, se trouvent classiquement mis en demeure de réaliser la prouesse d’accepter la renonciation à leur identité d’origine tout en la conservant pour se sentir exister, le temps de parvenir à éprouver leur nouvelle identité comme "authentique".

    La même attitude s’observe, bien que plus superficiellement, parmi les nouveaux arrivants d'aujourd'hui - les fameux bobos ou faubourgeois - qui font partie de la classe moyenne parisienne mais fuient l’ennui et le conformisme des beaux-quartiers.

    Alain Schifres les a récemment croqués avec une joyeuse méchanceté :
    "Une variété intéressante du Nouveau Parisien est le jeune faubourgeois à poil raide.
    Le faubourgeois est un de ces pionniers qui, au nord et à l’est, disputent l’espace aux faubouriens. C’est qu’il ne veut pas vivre chez les bourges (le voudrait-il, il n’en a pas les moyens). Les bourges sont chiants, leurs femmes ont de petits sacs avec une chaîne dorée. Leurs rues, le soir sont des cimetières. Le rêve du faubourgeois est d’habiter un vrai quartier populaire. [...] À mesure qu’avance le faubourgeois, hélas, le faubourien recule. C’est que l’animal fait monter les prix comme il respire. Il est à la recherche du fameux tissu urbain, mais la ville se démaille à son approche.

    [...] Il y a des signes qui ne trompent pas ; ils marquent la progression du faubourgeois. Ainsi nos alpages sont-ils devenus des hauts. On n’habite plus à Belleville mais les "hauts de Belleville".

    A suivre …

     

    >> Bienvenue à Boboland.

    >> Belleville: "East side story" (2/4)

     

     

     


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