• On l'a souvent comparé à Léon-Paul Fargue, sans doute à cause de son côté "piéton de Paris". Avec sa carcasse imposante, ses rouflaquettes grises, ses vêtements d'un autre âge, il s'est composé une silhouette presque légendaire.

    A partir de chez lui, rue Marcadet, Yves Martin n'en finit pas de sillonner la capitale. Rue des Martyrs, rue de Provence, le pont des Arts, le long des canaux, d'une porte à l'autre, il va partout et guette, selon les heures, le plus humble détail de la ville. Ses déambulations seront la source de ses meilleurs recueils: "Le Partisan", "Le Marcheur", "Manèges des mélancolies" …

    Dans un poème du "Marcheur" dédié à Eugène Dabit, peintre et auteur de "L'Hôtel du Nord", il nous livre l'un de ses tableaux parisiens de prédilection:

    "Au château tremblant, canal de l'Ourcq-Saint-Martin,
    Trépignaient les mariniers sous les drapeaux de frites.
    Les moules sautaient dans des cuves rouges
    Avec des clins d'œil bleus".

    Les "Manèges des mélancolies" sont pleins de cafés, de brasseries, de troquets et de bistrots. "Printemps 1966" renferme en un seul poème la "bougnate du Nord-Sud", les harengs de chez Lipp, des "volcans de choucroute", des "vins irascibles", et les ombres de Tinan et de Toulet, deux piliers de bar salués en passant ...

    Fondateur en 1959, avec le metteur en scène Bertrand Tavernier, du Nickel-Odéon, un très haut lieu de la cinéphilie, Martin se consacre à la  réhabilitation de films crépusculaires, comme "Les Passagers de la nuit", définissant du même coup sa propre esthétique: "L'inquiétude est sœur de la poésie."

    Paris reste pour lui un réservoir infini d'images et de sensations, le long des rues, à la terrasse des cafés, sur les écrans de l'après-midi, ce marcheur-voyeur regarde intensément les passantes.  "Le Marcheur" fourmille de rencontres amoureuses, vite évanouies dans ce Paris où tout semble possible …


    >> Le Partisan, suivi du Marcheur, par Yves Martin. Editions La Table ronde.

    >> Manèges des mélancolies. Poésies inédites (1960-1990). Editions La Table ronde.

     


     


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  •  Hôtel de la Paix – 4 rue Louis Bonnet – Paris 11ème (janvier 2009)

    Dans le 11éme arrondissement, la rue Louis Bonnet a toujours été une rue très commerçante.

    Dans les années 80, un bon nombre d'établissements de la communauté chinoise, en majorité des restaurants, s'implantent ici. Ceux-ci remplacent des commerces tenus jusqu'alors par la communauté juive, un changement caractéristique de l'évolution de Belleville. Et c'est ainsi que disparaîtra, entre-autres, la célèbre charcuterie delicatessen Goldenberg avec ses spécialités d'Europe centrale.

    Toutefois, jusqu'au tournant de l'an 2000, la physionomie de la rue change peu et elle conserve alors pratiquement les mêmes immeubles depuis plus d'un siècle.

    Mais aujourd'hui la rue présente un tout autre visage et, ce sont les petits hôtels qui font les frais de la restructuration du secteur. C'est ainsi qu'au bas de la rue, au N°4, on vient d'assister à la destruction de l'hôtel de la Paix.

    Fermé suite à un incendie qui s'était déclaré dans ses étages supérieurs, l'Hôtel de la Paix a été muré pendant de longues années pour empêcher les squatters de l'occuper. C'est là qu'avait été tourné une séquence du film "Bourne Identity", où l'on voit Bourne et Marie se cacher dans ce petit hôtel de la rue Louis Bonnet.

    Cette rue qui peut de prime abord sembler plutôt paisible a connu pas mal d'évènements plus ou moins dramatiques: plusieurs incendies dans un périmètre restreint, des bagarres de rue intercommunautaires entre Juifs et Arabes et de nombreux règlements de compte dont certains avec mort d'hommes …

    Non décidément, rue Louis Bonnet, ce n'est pas vraiment la Paix !


    >> The Bourne Identity, (ou La Mémoire dans la peau), un film réalisé par Doug Liman et sorti en salles en 2002 avec Matt Damon dans le rôle principal.(capture d'écran)

    >> Demande de démolition du 2-4 rue Louis Bonnet.

    >> La guerre à l'Hôtel de la Paix.



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