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    La couleur de Paris.

     

    "De ma lucarne, j'ai vue sur Paris et je regarde les dômes, les flèches, les coupoles, les tours, les cheminées d'usines, les toits, les siècles, le gris du zinc, de l'ardoise et des fumées ou des brouillards. Le gris est la teinte dominante, mais un gris nuancé, différencié à l'extrême."

    Extrait de "Tout sur le tout" d'Henri Calet

     

     

    >> Quand Henri Calet traînait dans les quartiers pourris de Paris.

     

     

     


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  • Les Photographes Humanistes (2/13) : Sabine Weiss

      L'homme qui court, Paris, 1953. © Sabine Weiss

     

    (Billet dédié à Sarah, elle se reconnaîtra)

     

    C'est sans doute la dernière grande représentante encore vivante de l’école humaniste de la photographie française d'après-guerre. Sabine Weiss, née en 1924, a aujourd'hui 93 ans … et 80 ans de prises de vue "derrière elle".
    Et il faut croire que la photo humaniste assure, à qui la pratique, une belle longévité : Ronis a vécu jusqu'à 99 ans …

    Sabine Weiss démarre la photographie très jeune, parce que la manipulation chimique du développement l'intéresse ; son père est ingénieur chimiste.

    Genevoise d'origine, une peine de cœur la fait fuir à Paris en 1946. Elle y débarque au petit matin sans point de chute mais rapidement devient l’assistante du photographe de mode Willy Maywald. Trois ans plus tard, elle rencontre son mari – le peintre américain Hugh Weiss – et se lance comme photographe indépendante. Elle fait alors de tout : de la publicité, de la mode, du reportage et des portraits d’artistes.

    En 1950, elle fait le portrait de Miro, ce qui lui vaut un rendez-vous avec le directeur de Vogue. Elle dira : " Je suis arrivée avec mes photos de clochards et de morveux. Un monsieur assis à côté de moi, hochait la tête en disant : « Bien, bien ». C’était Robert Doisneau. Je ne connaissais même pas son nom à l’époque. Tout de suite, il m’a proposé de rejoindre l’agence Rapho".

    Le fondateur de Rapho, Charles Rado, exporte alors le travail de Sabine Weiss aux Etats-Unis, où elle devient plus connue qu’en France.

    Sabine Weiss photographie beaucoup pour Vogue mais ce sont ses clichés en noir et blanc, des instantanés captés dans les rues de Paris, qui marqueront l’histoire de la photographie du XXe siècle.
    Sens de la composition, maîtrise de la lumière et de l'instant décisif, elle s’inscrit dans la lignée d’un Cartier-Bresson ou d’un Willy Ronis, les géants de la fameuse "école humaniste française de l’après-guerre".  Plus tard, elle déclarera : "Je n’aime que les photographies prises dans la rue, au hasard des rencontres ". 

    Photographes humanistes… Pourquoi a-t-on inventé ce terme ?
    Parce que ces photographes sont sensibles aux gens qui les environnent et produisent des images pouvant paraitre simples, dépouillées, mais qui montrent la joie, le malheur, la vie de tous les jours d’un individu. Et, certaines de ces images, sans importance à l’époque, deviennent aujourd'hui capitales car la vie a changé.
    Sabine a photographié surtout les gamins et les clochards des rues de Paris, les passants, les amoureux et les musiciens, avec une sensibilité et un talent de la composition formidable.

    Dans les années 1980, Sabine Weiss multiplie les voyages et se penche notamment sur la thématique des religions.
    Elle a arrêté la prise de vue il y a 2-3 ans car avec une épaule cassée, elle dit ne plus pouvoir tenir convenablement l’appareil….

    C’est désormais la gestion de ses archives qui l'occupe car elle vient d'en faire le don au Musée de l’Elysée, à Lausanne : 200 000 négatifs, 7000 planches-contacts, quelques 2700 tirages vintage et 2000 tardifs, 3500 tirages de travail et encore 2000 diapositives… eh oui, 80 années de déclic ! Merci Madame !

     

    >> Sabine Weiss, en juin 2016 (photo © Jacques Maugars)

    >> Sabine Weiss, site officiel

    >> 
    Photographes Humanistes (1/13) : Marcel Bovis

     


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  • Trainée ou Poulbot ?

    Rue Poulbot Paris 18ème, février 2017

    Jusqu'en 1967, au cœur du vieux village de Montmartre, l'actuelle rue Poulbot se nommait rue Trainée. Et, la petite impasse mal pavée qui donnait sur cette rue, portait le même nom, c'était l'impasse Traînée...

    On peut penser que ce changement de nom est le bienvenu car il semble préférable de rendre hommage à l'artiste qui a immortalisé les gamins du quartier plutôt qu'à une trainée, une femme de mauvaises mœurs.

    Erreur, vous n'y êtes pas du tout... car la traînée dont il s'agit n'est pas la femme des rues ou des impasses, c'est une manière de chasser les loups en tirant sur le sol une charogne qu'on met ensuite dans un piège dissimulé par une trappe. On disait alors que l'on chassait le loup "à la traînée".

    Utrillo qui a peint l'impasse aurait du mal à la reconnaître aujourd'hui. Pourtant l'ancienne ruelle a conservé une allure de village avec ses maisons blanches, ses jardins et sa palissade en bois.
    Au fond de l'impasse en pente, un portail bleu, et derrière celui-ci la cour de récréation d'une école : Eh oui, les Poulbots sont bien toujours là ! …


    >> Je reviens d'une rue qui n'existe pas ...

    >> "Impasse Trainée", par Utrillo

    >> "Impasse Trainée", par Izis (1)

    >> "Impasse Trainée", par Izis (2)

     

     

     

     


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  • Photographes Humanistes (1/13) : Marcel Bovis

    Marcel Bovis, Boulevard Beaumarchais, Paris, 1954

     

    Il y a une dizaine d'années, j'écrivais : "on ne se lassera jamais de regarder les images de ces photographes humanistes : celles des célébrissimes Ronis, Doisneau, Boubat, Izis, Brassaï et celles d'auteurs moins connus -mais tout aussi représentatifs de ce courant- que sont : Marcel Bovis, René-Jacques, Jean Dieuzaide, Janine Niepce, Sabine Weiss, Jean Marquis, Jean-Philippe Charbonnier, Édith Gérin, Ina Bandy, André Papillon, Léon Herschtritt, Jean-Louis Swiners ou encore Eric Schwab ..."

    Et bien à partir d'aujourd'hui, je vais vous faire découvrir ou mieux connaître ces photographes humanistes peut-être moins célèbres mais tout aussi représentatifs de ce courant.

    Ils sont donc 13 et le premier d'entre-eux, qui d'ailleurs est sans doute le plus connu, est Marcel Bovis.

    Bovis est un photographe au tempérament discret, un travailleur acharné, un manuel et un homme curieux que tout intriguait.
    Né à Nice en 1904, donc avant Willy Ronis (1910), Izis (1911) et Robert Doisneau (1912), Marcel Bovis découvre la photographie au service militaire, à Briançon. Premiers sujets : les paysages enneigés et ses copains de régiment, des photos qu'il développe dit-il : "dans l'écurie du colonel, le seul endroit où il y avait de l'eau".

    C'est un hobby certes, mais il le pratique avec sérieux, patience et précision car, par exemple, n'ayant pas de cellule, il devait intuitivement deviner le temps exact de pose.

    Tout en gagnant sa vie comme décorateur, Bovis continue à apprendre et, sur un coup d'audace, rejoint l'équipe de la revue Arts et Métiers graphiques. De cette époque des années trente, datent ses beaux reportages sur Paris la nuit, puis, plus tard, ses clichés sur les fêtes foraines, dont il saura préserver la densité poétique.

    En 1941, désormais rattaché au monde de l'image, Marcel Bovis devient un photographe-illustrateur pour des éditeurs, ou même des auteurs. Chartres et ses vitraux, Bourges, Nîmes, Avignon, la France l'accueille à bras ouverts, comme naguère le fakir Motto Louis avec sa femme volante.
    S'il est plutôt resté en coulisses, témoin modeste loin des stars et des sunlights, on lui doit toutefois un somptueux portrait de Duke Ellington. Marcel Bovis a aussi expérimenté les solarisations, tenté quelques collages, osé quelques nus et beaucoup étudié l'histoire de la photographie : ­ il était fou d'Eugène Atget et de son esprit indépendant, "fidèle à la ligne qu'il s'était tracée".
     
    En 1991, Marcel Bovis fait don à l'Etat français de tout son trésor, plus de vingt mille négatifs et contacts originaux, réalisés entre 1927 et 1977.
    "J'ai essayé de faire au mieux", confiera-t-il lors de sa rétrospective au Palais de Tokyo (1992), heureux de cet hommage qui lui donnait l'occasion d'évoquer Paris.
    Il nous a quittés en 1997, il avait 93 ans …

     

     

    >> Marcel Bovis au Jeu de Paume

    >> Les Humanistes sur Parisperdu

    >> La photo humaniste a-t-elle un avenir ?

    >> Voir aussi : Paris dans l'œil des maîtres. (3/3)

     

     

     


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  •  Chais de Bercy : l'esprit d'un lieu en déshérence

    Rue du Mâconnais - Paris 12ème (1997)

    C'est un décor fantôme, où l'on ressent l'abandon souverain qui habite le lieu.
    Drôle de lieu d'ailleurs, presqu'un non-lieu …

    Les jeux des lumières, les matières vieillissantes, les perspectives et la structure du bâtiment sont mis en évidence et magnifiés par le silence qui règne ici.
    Ce silence omniprésent, parait correspondre à un temps qui se serait tu, il en émane une atmosphère énigmatique, questionnant le spectateur sur la vie passée et l'esprit de ce lieu en déshérence.

    Mais il me semble que quelqu’un est là … alors que l'on n'aperçoit que … quelque chose ! Alors oui, en fermant les yeux, on imagine aisément la vie de ce local aujourd’hui abandonné. On devine le tintement des bouteilles, l'omniprésente odeur du vin rouge qui vous prend à la gorge, la silhouette furtive d’un maître de chais … Et toutes ces présences invisibles deviennent l’esprit de ce lieu désert.

     

     

    >> Dans les Chais de Bercy.
     

    >> Voir aussi: Aurélien Villette, photographe des lieux en déshérence

     


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