• Il est huit heures du matin et Martha rentre chez elle après une nuit de labeur. Martha est agent d'entretien au BHV, autrefois on aurait dit qu'elle était femme de ménage …

    Son "chez elle" est situé dans le petit immeuble gris que l'on aperçoit sur la gauche de la photo. Elle y occupe un appartement confortable qu'elle a hérité de sa mère. Il est situé en un lieu reculé du 20ème arrondissement, Impasse Villiers de l'Ile Adam.

    Ce lieu qui pourrait être paisible est en fait un véritable enfer ... car, au fond de l'impasse, ... c'est un autre monde !
    Le  bloc d'habitations qui ferme l'impasse, c'est le 140 rue de Ménilmontant, une "zone sensible", un "îlot difficile", une cité où la délinquance est endémique. Les trafiquants y agissent en bandes et suscitent - dans tout le quartier - un réel climat de peur, aussi dès que Martha sera rentrée chez elle, elle va immédiatement se barricader à double tour.

    Après avoir pris du repos pour effacer la fatigue de sa nuit de travail, elle ne ressortira qu'en milieu d'après-midi pour faire quelques courses, en évitant systématiquement le 140 rue de Ménilmontant; et l'hiver, en prenant garde de ne pas rentrer trop tard. Elle fera ses courses plus bas, dans la rue de Ménilmontant, après avoir fait un long détour par la rue de la Chine. Et c'est aussi, par cet itinéraire - plus sûr - qu'elle repartira, un peu avant minuit, pour le BHV.

    Ne cherchez plus aujourd'hui l'impasse Villiers de l'Ile Adam, elle n'existe plus ... Elle a disparu dans la restructuration du 140 rue de Ménilmontant.
    Transformée et  prolongée, l'impasse a permis de désenclaver la vielle cité. La voie nouvelle, ainsi créée, a pris l'appellation de "rue Hélène Jakubowicz". C'était le nom d'une jeune résistante dont l'appartement familial était situé ici, durant l'occupation. Hélène Jakubowicz fut déportée, à l'âge de dix-sept ans, dans le camp d'extermination nazi d'Auschwitz, où elle y a disparu ...

    La transformation du quartier, n'est pas pour déplaire à Martha qui vit maintenant ses jours de retraitée dans cet endroit devenu plus paisible.... Dans un autre monde.

    Elle habite en effet maintenant dans une rue dont le nom est certes, pour beaucoup, difficile à orthographier, mais pas pour elle ... car Martha est également une fille d'émigrants juifs polonais venus s'installer à Paris dans les années 30 ...



    >> Tout près d'ci: "Le 140 rue de Ménilmontant".

     

     

     


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  • Le banc, Boulevard Pasteur,  Photo: ©René-Jacques - 1927
     

     

    Marcel Bovis, André Kertész, René-Jacques, ... tous ont vécu à Paris, tous l'ont arpentée, scrutée, façonnée comme un inépuisable matériel d'inventions visuelles.

    Ainsi, de leurs déambulations, de jour comme de nuit, dans la perspective de la "trouvaille", du motif photogénique, est née, volontairement ou indirectement, une réelle "poétique de la ville".

    L'attitude de ces maîtres-photographes face aux espaces urbains - que sont l'immeuble, le monument, la rue, le quartier, etc... - dessine une cartographie fragmentaire et subjective d'un Paris du XXe siècle.

    L'événement et la narration restent en suspens, car pour eux -  contrairement à un Robert Doisneau ou un Willy Ronis - l'homme n'est pas le sujet principal, il n'est qu'un alibi mis en image pour structurer un environnement beaucoup plus vaste : des ombres traversant une chaussée humide ; un couple vu de dos à la vitrine d'un snack ; une figure féminine prise devant le panorama de Montmartre ...

    Oui, leur objectif commun est bien la structuration de l'espace, de laquelle se dégagera une création poétique. 

    A suivre ...


    >> En savoir plus sur René-Jacques

     

     


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    Ici, dans le jardin des Tuileries, tout près de l'arc de triomphe du Carrousel, nos "chères têtes blondes" pourront faire une petite pause, juste le temps de donner à manger à quelque canard affamé ...

    Mais nos enfants pourront aussi s'asseoir sur le rebord du grand bassin pour renouer avec les jeux de leurs ancêtres, en guidant un petit bateau ... loué sur place.

    Alors, dans le grand bassin rond des Tuileries, les incontournables petits bateaux à voiles vogueront parmi les canards et les carpes et ...
    comme toujours, ils finiront par aller se coincer sous le jet d'eau ...

    Et pour qu'ils reviennent, Maman, "ont-ils des jambes ..." ? 

     

    Billet dédié à Elisa, dite "Miss Zouzou".

     


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    Ici, rue Laurence Savart, la vie s'écoule en pente douce ... Et cette rue est
    propice aux rencontres, aussi belles qu'inattendues.
    Willy Ronis en avait fait l'expérience dans les années 50, lorsqu'un jour, au petit matin, en descendant la rue, il croise un vitrier avec son lot de carreaux de verre sur le dos.

    Aujourd'hui, le côté résidentiel a remplacé ce qui fut populaire, qui lui même avait pris le pas sur le rural : toute une chaîne successive de prédation sociale, un écosystème historique en quelque sorte !
    D'ailleurs, n'est-ce sans doute pas un hasard si les écologistes font ici - à chaque élection - leur meilleur score parisien !

    Mais au final, dans la rue Laurence Savart, peu de choses ont changé ... et l'on se retrouve confronté - aujourd'hui - aux mêmes façades, aux mêmes portes de garage, aux mêmes maisonnettes ... que celles aperçues sur la célèbre photo de Ronis.

    Aujourd'hui, j'ai retrouvé un peu du Paris perdu ...



    >> "La rue Laurence Savart", Photo: ©Willy Ronis

    >> Association Willy Ronis  "Pour le cadre de vie de la rue Laurence Savart ". 

    >> Voir aussi : "Les hauts quartiers de l'Est parisien font de la résistance". 

    >> Voir aussi : "Rue Laurence Savart : Lieux retrouvés 004" de Parisperdu.

     

     

     


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  • La Place de l'Argonne dans le 19ème arrondissement est un lieu quelque peu étrange, un lieu aux marges de la ville, à proximité des voies ferrées de la Petite-Ceinture et de la confluence du canal Saint-Denis et du canal de l'Ourcq.

    Peut-être cette place insolite doit-elle son nom à sa position géographique dans Paris qui est un peu similaire à celle que tient la région de l'Argonne en France ? En effet, l'Argonne n'est-elle pas une région naturelle de l'Est de la France, s'étendant de la Marne aux Ardennes, donc là aussi, aux marges d'un territoire ?

    Mais sommes-nous ici, toujours dans Paris ?
    Oui, car "être à la marge" ne conduit pas nécessairement à l'exclusion. Et, par rapport à la norme du centre-ville, un quartier à la marge, en lisière, s'invente d'autres formes de complicité, de partages, d'autres pratiques culturelles inédites et cosmopolites, voire de nouvelles formes architecturales ...

    Et c'est bien ce que l'on constate ici, place de l'Argonne, un lieu "loin de tout" mais qui a su créer une vraie vie de quartier grâce à un amalgame réussi de commerces, d'immeubles de bureaux, de logements ...

    Avec son austère pont de chemin de fer, la "face Est" de la place, désormais redessinée, plantée d'arbres et rendue aux piétons, est devenue une place plus aérée, plus lumineuse ...

    Le soleil ne se lève-t-il pas toujours à l'Est ... ?


     
    >> La place de l'Argonne, aujourd'hui. (Image de synthèse: "Mairie de Paris")

      
     

     


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