• Dans le square Sarah-Bernhardt, face à la rue Frédéric Loliée_ Paris 20ème (Juillet 2012)

    Plusieurs fois je me suis rendu rue de Lagny pour rendre visite à mon cher professeur, comme j'aimais à l'appeler. Willy Ronis, puisque c'est de lui qu'il s'agit, goutait pourtant moyennement l'expression. Mais il n'en laissait rien paraître tant il était un parfait modèle de courtoisie. Une qualité "à l'ancienne" … et qui tend à disparaître.

    Je n'étais pas encore retourné dans le quartier depuis la disparition de Willy. Je n'en avais guère envie tant je savais que cette excursion raviverait le vide que je ressens depuis son départ.
    Pourtant, en cette fin d'après-midi, le square Sarah-Bernhardt m'apparaît lumineux. Lumineux, mais rigide avec ses immeubles typiques des limites de la capitale et dont la brique rouge vire à l'orange sous le soleil couchant. Ils éclairent encore les fonds du square et l'égayent, bien que d'une façon pour ainsi dire technique et administrative, conforme à sa fonction de loisir. Je dirais volontiers que c'est scandinave, socialiste-humaniste dans le sens qui reconnaît mais réduit les droits de la personne, relativement à une moyenne qu'elle accepte d'incarner.

    Aux alentours, on a vite fait le tour des commerces: la moitié des rares magasins sont fermés, rien d'indispensable ou d'urgent n'explique la présence des autres: un teinturier, un marchand de tapis, un vague électricien … Il faut certainement remonter jusqu'à la rue d'Avron pour trouver du pain, des œufs, des journaux, des légumes, du vin, du tabac, des gens qui circulent … et rien ne prouve que cette distance d'environ quatre cents mètres n'étouffe pas toute velléité d'effort.
    Il y a tout de même un cordonnier. Sa vieille blouse grise, ses cheveux blancs, le foutoire qui l'entoure, la lampe orange qu'il vient d'allumer humanisent le cube abstrait qui lui tient lieu d'échoppe, en ce soir d'été, rue de Lagny.
    Pourtant le fracas qui nous vient du cours de Vincennes nous indique qu'un autre monde vivant, bouillonnant, existe … tout près.

    Il fait quasiment nuit maintenant sur le square Sarah-Bernhardt, ce qui produit un climat apaisant et m'apporte des pensées positives sur Willy.
    Je quitterai pourtant les lieux sans un regard au 46 rue de Lagny …


    >> Sur le banc avec Willy Ronis …

    >> Chez Willy Ronis.

     


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  • Sur les pas de Willy Ronis : cour du 32 rue de la Mare Paris 20ème.

    Le grand Willy Ronis, écrit en 1979, dans son ouvrage "Sur le fil du hasard" :

    "On remarque, paraît-il, une certaine mélancolie dans mes photos. Cela s’explique. J’ai eu beaucoup de loisirs forcés au cours de périodes de sous-emploi ; autant meubler ces vides avec la chasse aux images.

    Mais de telles conditions n’inspirent pas la joie, surtout qu’entre deux pressions sur l’obturateur on se dit qu’on travaille pour le tiroir.

    Mes chasses joyeuses, je ne les vécus que lorsque je volais mon temps à celui que je devais consacrer au travail commandé, ou lorsque le déclic provoqué par un événement inattendu faisait monter la fièvre des grandes émotions. Mélancolie souvent, mais pas pessimisme ; ça ira mieux demain. "

    Au cours des années 90, je me suis souvent senti en parfaite harmonie avec ces propos et, confidences pour confidences, moi-aussi, je volais parfois mon temps à celui qui m'employait, … en parcourant incognito l'Est parisien, pour y faire la chasse aux images.

    Tant et si bien, qu'en 2005, à la création de ce blog, j'avais pensé lui donner le nom de "ParisVolé" … mais finalement, ce sera : "Parisperdu".


    >> Willy Ronis: cour de la rue de la Mare.(1947)

    >> Sur les pas de Willy Ronis : cour du 32, rue de la Mare.





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  • A 82 ans, Line Renaud vient de donner trois soirées de concerts à l'Olympia, une salle où elle chantait pour la première fois de sa carrière.

    Hier, c'était la dernière représentation, un triomphe !

    Et c'est également hier, au détour d'une petite rue, dans un quartier perdu, que je suis tombé nez à nez avec "ce chien dans la vitrine" …

     

    Bien sûr, "ce joli p'tit chien" n'est pas "jaune et blanc" comme le dit la chanson … mais comment, à cet instant, ne pas penser à cette grande dame du music-hall qui, en 1953, publiait son nouveau 78 tours avec "Le Chien Dans La Vitrine", une chanson écrite et composée par son mari Loulou Gasté.


    Une époque qui certes peut sembler bien lointaine … mais qui reste d'actualité, grâce à la vitalité et la jeunesse d'une octogénaire.

    Alors :

    " Combien pour ce chien dans la vitrine ? "

    " Eh bien c'est d'accord je le prends…"

     

     

     >> A 82 ans, Line Renaud découvre l'Olympia 

     

      

     

     


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  • Campement de Roms, Bidonville (2002- 2006) -  Boulevard Mac Donald - Paris 19ème

    Photo © Eric Garault /Picturetank.

     

     

    Le point de départ ne peut être plus concret : une carte IGN de Paris et de sa région. Sur la carte, des zones restent étrangement blanches, sont-ce des terrains à construire, des terrains  militaires … ?
    Lorsque vous allez sur place explorer les lieux, les "vides" de la carte n°2314 OT de l'IGN, vous comprenez alors que les cartes n'entretiennent que des rapports très lointains avec le réel !

    Souvent, derrière ces occultations suspectes, vous allez découvrir ce que nos villes modernes refoulent vers l'extérieur : une misère odieuse et anachronique, des bidonvilles cachés aux portes de la capitale, des espaces réservés aux sans domicile fixe et aux gens du voyage.
    Et, dans le Paris citadin, boulevard Mac Donald, ou Porte d'Aubervilliers, c'est l'envers de la ville, la ville à l'envers : tout ce que nos responsables politiques nous cachent.

     

    Ayant vu ce que dissimulait la carte de la région parisienne, on comprend comment, à Washington ou au Cap, on a pu mettre en vente des plans de la ville où, tout simplement, les quartiers pauvres ne sont pas représentés. Des plans de la ville où ne figure qu'un tiers de la ville…

     

    A l'heure où les métropoles voient leurs townships et leurs favelas broyés par l'abandon, à l'heure où Paris devient une ville-musée inaccessible; les campements du boulevard Mac Donald ou de la Porte d'Aubervilliers montrent le paradoxe de nos mégapoles : à l'époque du GPS et des caméras de surveillance, nous ne connaissons rien du monde ...



    >> Aller plus loin avec le "Livre blanc" de Philippe Vasset.

    >> Bidonvilles/Seine, par Eric Garault




     


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  • Lorsque je les ai vues, près du métro Stalingrad, j'ai immédiatement pensé à la célèbre photo d'Izis. Les auto-tamponneuses étaient là, bien rangées dans la lumière d'un soir d'été. Leurs carrosseries en plastique, incrusté de paillettes argentées, brillaient de mille feux.

    Mais seul, Jacques Prévert comme il l'a fait pour Izis dans l'ouvrage: "Grand bal du printemps" aurait su retrouver les bruits et les sons évoqués par cette photographie.

    Car le "Grand bal du printemps", qui est sans doute l'un des plus beaux livres de photographies de l’après-guerre, montre d’emblée par son titre que l’ouvrage se place dans une thématique musicale et, dès le premier poème du recueil, Prévert compare Izis à un musicien des rues :

    "C’est un colporteur d’images
    et même sans le savoir
    un musicien ambulant
    qui joue à sa manière
    surtout en hiver
    le Sacre du Printemps."

    Alors, les scènes deviennent presque sonores malgré le silence des images : c’est le cas par exemple pour cette photographie d'Izis, où un couple d’amoureux s’embrasse dans une auto-tamponneuse. Prévert évoque alors "le doux fracas du manège dans le vacarme de cette fête".

    Dans le vrombissement du trafic de la place de Stalingrad, oui aujourd'hui, j'ai retrouvé les auto-tamponneuses d'Izis …


    >> Les auto-tamponneuses d'Izis … ©Izis (1951)

    >> Vous pouvez louer un Manège d'Auto tamponneuses !

    >> Voir aussi sur Parisperdu: "Izis, Paris des rêves". 


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