Chez Freddy (aujourd'hui fermé), un des derniers cafés de la rue de Tourtille Paris 20ème_ Photo: © Sylvaine Conord
Une ville en recouvre toujours une autre. A Belleville, avec les destructions d'îlots anciens remplacés par des constructions plus ou moins anarchiques, les frontières des migrants se sont déplacées au fil des années. Les Chinois dans le bas-Belleville ont déplacés les juifs séfarades qui eux-mêmes ont poussés les arméniens hors de Belleville.
Pour comprendre, pour sentir ces évolutions, le mieux est de pousser la porte d'un café de Belleville.
Une fois à l'intérieur, il faut choisir sa table, idéalement dans un angle de la salle, mais assez près du zinc afin de pouvoir écouter et observer les figures locales qui se relayent ici pour prendre leur quart sous des néons d'une autre époque. A l'opposé du comptoir, aux tables du fond de la salle, de vieux clients impassibles ont leurs habitudes: rêvasser là, sans un mot, dans un décor baroque.
Mais ces dernières années, le quartier est devenu un genre de Brooklyn parisien sans qu'on sache très bien de quel côté il va dériver. Vers un riche melting-pot à la new-yorkaise, produit de l'incessant métissage et de la boboïsation. Ou vers un quartier où la haine entre les communautés est explosive?
Dans tous les cas, on aurait bien besoin des bistrots de quartier où il fait bon se coudoyer… Mais en restera-t-il encore ? Alors que tous ferment les uns après les autres.
>> "Belleville Cafés" par Anne Steiner et Sylvaine Conord, aux Editions L’Échappée.
>> Tout proche de "Chez Freddy", il y avait aussi "Chez Fanfan".
>> Malaise à Belleville.