"Nu à contre-jour" par Pierre Bonnard (1908) "Le nu provençal" par Willy Ronis (1949)
La célèbre photographie du "Nu provençal" où Ronis nous montre son épouse Marie-Anne peut rappeler les toiles de Bonnard montrant sa femme Marthe Boursin (dite de Méligny).
Mais l’analogie va bien au-delà du sujet (le nu à la toilette) et du cadre (le contre-jour de la fenêtre). Par son caractère familier authentique et sa réelle intimité, l’image évoque ces moments à couper le souffle, nés d’un regard posé sur un être aimé, qui soudain comble le cœur.
Comme chez Bonnard, dont les peintures de Marthe la montrent toujours dans l’éclat de sa jeunesse, Ronis en photographiant son épouse Marie-Anne (elle a alors 39 ans) la maintient dans le temps et la garde dans son éternelle jeunesse.
Là est le vrai point commun avec Bonnard : l’acte de mémoire et d’amour.
"Le Nu provençal" est comme un Bonnard qui montrerait Marthe en noir et blanc dans une splendeur de lumière… Toutes deux nues, de dos, face à un lavabo que jouxte la fenêtre produisant le contre-jour.
Ne dirait-on pas la même image, passée en couleur et dont le sujet s'est redressé pour finir sa toilette ? Car il arrive parfois que l'on se retrouve face à une œuvre d'art qui fait écho à une autre œuvre d'art, qui fait elle-même écho à des choses auxquelles on est sensible ou même que l'on a vécues.
Mais quand on parle à Ronis de cette proximité avec le tableau de Bonnard, il répond : "On me l'a souvent dit, en effet. Mais au moment où j'ai pris la photo, je n'y ai pas songé une seconde.
J'ai pensé : c'est un joli nu, c'est ma femme".
(A suivre…)