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Yvette Troispoux, la "photocopine" de Doisneau.

Yvette Troispoux, lors de l'hommage qui lui avait été rendu aux Rencontres d'Arles en 2004.

 

Moins connus que Robert Doisneau, Willy Ronis, Édouard Boubat, Izis ou Sabine Weiss, Yvette Troispoux est pourtant l’une des grandes figures de la photographie humaniste. Paris est le cadre privilégié de cette école de photographes. Dans la capitale, les photographes humanistes captent le quotidien des Parisiens aussi bien à leur travail que dans leurs loisirs.

C'est aussi vrai pour Yvette Troispoux, connue comme étant "La photographe des photographes" et surnommée tendrement par Doisneau, sa "photocopine". 

A Paris, elle parcourait les galeries photo et, à chaque vernissage, elle en profitait pour tirer le portrait du photographe exposé, d’où son surnom de "photographe des photographes". Yvette se fondait dans la foule et avant même que le sujet ne l'ait reconnue, elle déclenchait son appareil. Gisèle Freund, Robert Doisneau, Édouard Boubat, Brassaï, Helmut Newton, et tant d'autres se sont laissé immortaliser par Yvette Troispoux. "Je crois les avoir tous photographiés, excepté Niepce, l'inventeur de la Photo ! " aimait-elle dire en plaisantant.

En 2008, l'année suivant son décès, la BnF, a préempté, un fonds composé de l’intégralité de ses négatifs, de ses planches contacts et de ses archives personnelles. Car ces archives sont d’une importance considérable pour documenter la vie de la photographie à Paris sur la période 1950-2000, et sa dispersion aurait représenté une perte sévère pour l’histoire de cette période.

Et cela aurait gravement nui à la reconnaissance de son talent … trop longtemps caché au grand public.


>> L'expo de la BnF.

>> La seconde mort d'Yvette Troispoux par François-Marie d'Andrimont :

 

Le texte qui suit a été écrit pour la lettre hebdomadaire de Photographie.com. Il produit une bonne synthèse des multiples problèmes posés par cette vente.

Françoise Denoyelle, citée par l'auteur, est une collègue historienne de la photographie qui est à l'origine d'une association pour la défense des photographes et de leurs ayants droits, suite à la dissolution de la Mission du patrimoine photographique (ministère de la culture).
Vous pourrez trouver des informations complémentaires sur cette association en consultant son site :
http://www.adidaepp.org



Yvette Troispoux avait beaucoup d'amis. Depuis plus de 75 ans, c'Était carrément tout le monde de la photographie - qui ne la prenait pas vraiment au sérieux, mais « si Yvette n'était pas là, c'est que l'événement n'était pas important », se souvient François Hébel, le
directeur des Rencontres d'Arles. Elle est décédée le 11 septembre 2007. Elle était la "photocopine" des Doisneau, Ronis, Dieuzaide et de tant d'autres qu'elle photographiait avec la simplicité déroutante de son Leica, son cabas au bras. « C'était la seule qui aimait vraiment la photo, les autres ne pensent qu'à Beaubourg » estime, lapidaire, Jean-
François Bauret. Pourtant, une part de l'histoire de la photographie pourrait bien disparaître ce prochain dimanche, car tous les négatifs d'Yvette Troispoux seront dispersés à tous vents lors d'une vente aux enchères, transformant sa mémoire en cendres. « Ce sont les négatifs qui renferment toute l'histoire de la photo. On disperse à Coulommier une part de l'histoire de la photo » s'insurge l'historienne Françoise Denoyelle qui avait pourtant contacté toutes les institutions, et obtenu l'intérêt de la BnF afin que le fond soit protégé.

À défaut d'une préemption, on ne peut que souhaiter que l'une des personnes qui accompagnaient la dame âgée grimper les 5 Étages menant à son petit appartement après un vernissage tardif, puisse acquérir ce fond pour le confier à une institution patrimoniale. Car il y a urgence, déjà la plupart des tirages offerts à la « photographe des
photographes » par de nombreux et célèbres confrères semblent avoir d'ores et déjà disparus. Hormis un tirage de Marc Riboud (le peintre de la tour Eiffel), aucun de ces cadeaux, comme les désignait Yvette Troispoux, ne figure à la vente nous a confirmé en début de semaine Maître Françoise Dapens-Bauwe, la commissaire-priseuse qui parait
totalement dépassée par la tournure de l'affaire. « Il y en avait très peu, cela m'a étonné. Je n'ai, par exemple, pas vu de photo signée Doisneau alors qu'ils étaient intimes » se souvient Alain Bacou qui avait aidé la commissaire-priseuse à préparer la vente. Où sont les tirages offerts à Yvette par Robert, Willy, Jean et les autres ? Nul ne sait. Mr. Beaujeu, le généalogiste qui représentait les héritiers à Paris, nous a précisé qu'il n'y ne reste pas d'autres tirages que ceux présentés
À cette vente. Restent bien d'autres questions : pourquoi cette vente qui ne devrait pas rapporter beaucoup, a-t-elle été décidé alors qu'une institution avait proposé d'accueillir - et d'acheter - le fond photographique d'Yvette ? Pourquoi est-elle organisée loin de Paris, et surtout sans inventaire sérieux empêchant du même coup la préemption ? Ce gâchis symbolise assurément l'absence de protection du patrimoine photographique éclaté aujourd'hui par les intérêts privés et marchands.

Dimanche 22 Juin 2008 à 14 heures, la vente du fonds photographique d'Yvette Troispoux est programmé à l'hôtel des ventes de Coulommiers, vente placée sous l'Égide du commissaire- priseur : Maître Dapsens-Bauve.

 

 

 

 

Tag(s) : #photographes
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