• " Mon point central, c'était la place des Fêtes ".

    La place des Fêtes,  novembre 2009 -  Paris 19ème


    Ce billet est publié à l'occasion du 150ème anniversaire du 19ème arrondissement. Plus particulièrement, il est destiné à accompagner le concours photo: "D-Clic-19 : Mon quartier Place des fêtes" qui se déroule, jusqu'au 8 juin, dans le cadre de cette manifestation.

    Pour cet évènement, nous vous proposons de faire un petit retour en arrière grâce à Paul Adnot, un ancien résident du quartier, qui nous relate l'ambiance populaire, animée et chaleureuse d'un Belleville aujourd'hui disparu.

    "Flash-back" donc, avec Paul:

    "J'ai été deux fois déraciné.
    J'aimais la campagne, j'étais habitué au grand air, aux champs, et on m'a ramené à Paris, dans cette ville incroyable, j'étais perdu, affolé, on m'a mis à l’école avec des instituteurs qui étaient des peaux de vaches.
    La deuxième fois que j'ai été déraciné, c'est quand ils ont foutu notre quartier en l'air. Tout le monde se connaissait avant : c'était un village, c'était notre campagne à nous. Ce n'est pas comme maintenant, on passe à côté des gens sans les voir, personne vous voit, vous voyez personne non plus. Mon point central, c'était la Place des Fêtes quand j’étais gosse : il y avait des baraques foraines dans le "square Monseigneur Maillet", il y avait la fête, des parades foraines. Le dimanche, les cafés étaient pleins; ils restaient ouverts jusqu'à près de minuit : bien sûr, il y avait quelques ivrognes… L'été, on sortait du boulot, on avait soif, on allait boire un pot chez Dupont, au coin de la rue Pré-Saint-Gervais et de la rue Compans.

    Puis ça a commencé avec les types qui ont commencé à prendre les métrés, les géomètres, puis après, on a vu arriver les engins avec leurs grosses boules d’acier qui abattaient les murs. Les premiers bâtiments construits sont les "paquebots" de la rue de Bellevue. Après, ils ont foutu en l'air l’école de garçons : j'en ai bavé dans cette école, mais ça m’a fait mal au ventre quand ils l'ont démolie, c'était mon passé. Quant à moi, j'habite dans des HBM (habitations bon marché), les HLM d'autrefois qui ont été construits en 1921 et finis en 27. J'avais un oncle, peintre en bâtiment : quand il a vu mon appartement, il n'en revenait pas : vous vous rendez compte, les W-C. chez soi ! Or, on ne savait pas ce qu'ils allaient construire... Quand on a vu la hauteur des constructions alors là, ça nous a déchirés ! C'était affreux... Quand on sortait du métro, tous les gens s'arrêtaient, regardaient, et comptaient les étages en espérant chaque jour qu'ils s’arrêteraient. Par rapport à ce qui était prévu, ils ont changé quatre fois de plans, mais les tours y étaient toujours. Pas mal de gens sont partis en banlieue  (ceux qui ont été expulsés); d’autres ont été relogés près des casernes entre la Porte des Lilas et de Bagnolet : c'est pas beau, je voudrais pas y habiter.

    Alors une nouvelle époque est née, et sont apparus les frigidaires, les télévisions, tout le confort, quoi ! J'avais un copain d’enfance, on allait le voir tous les vendredis soir. On arrive : Ooh !... Il s'était acheté un frigidaire ! Le lendemain, on achetait un frigidaire. Un soir on arrive, il avait acheté la télé : c'est pas vrai ! Moi, je l'ai acheté un ou deux ans plus tard. Mais çà a été dommage : on était collé dessus ! Vous vous rendez compte : le cinéma à domicile, on se dérange plus !... Maintenant, je suis plus sélectif, je ne regarde pas n’importe quoi ".


    Paul  Adnot nous livre-là le témoignage authentique d'une époque. Il a connu les taudis de Belleville, les miséreux, la face sombre de la condition ouvrière d'alors, contre laquelle luttait quotidiennement cette belle convivialité, faite de solidarité, d'entraide et dont il faut bien voir, derrière son aspect plaisant, qu'elle constituait une technique collective de survie, difficile à retrouver aujourd'hui malgré notre "crise" actuelle qui n'est pas comparable, même de loin, sinon peut-être au plan psychologique.

    Si cette ambiance Bellevilloise, désormais mythifiée, nous apparaît comme un passé irrémédiablement perdu; il est heureusement des gens qui, aujourd'hui encore, continuent à créer du lien entre les habitants de ce 19ème arrondissement, si vivant, si attachant …
    Alors merci à eux et, bon anniversaire à la Place des Fêtes !



    >> Le 19ème arrondissement fête ses 150 ans : Concours Photo.

    >> La place des Fêtes, déjà sur Parisperdu. 


    >> Voir aussi : "Ce n'est vraiment pas la fête ... !"




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  • Commentaires

    4
    Dimanche 19 Septembre 2010 à 17:58
    Place des Fêtes
    Bonjour, Très joli texte, très poétique, plein de nostalgie et de vérité ! Même si je ne connaissais pas la "Place de Fêtes" j'aurai pu la reconnaître après votre description. Bravo. Et Merci. alexb
    3
    Dimanche 30 Mai 2010 à 10:28
    Concours photo
    Bonjour à vous deux Vous ne vous inscrivez pas! Vous faites votre photo et vous la rendez avant le 9 juin au centre d'animation de la Place des Fêtes ou à Feu vert ( 1 rue des Bois) Vous n'oubliez pas derrière la photo de mettre votre nom, votre âge et votre adresse. A vous de jouer, maintenant. Sarah-k
    2
    Félix
    Samedi 29 Mai 2010 à 19:34
    D-clic
    on fai koman pour sinscrir ?
    1
    Abel
    Vendredi 21 Mai 2010 à 11:29
    Cool
    je vais prende le numeric de mon pere pour faire le concour. Cool je vais gagner
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