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Odoul et les lofteurs.
Jusqu'à un passé encore récent, se dressait fièrement, rue de l'Atlas, une forteresse en briques rouge. Dans cette petite rue en pente régnaient alors les "Etablissements Odoul", une entreprise spécialisée dans les déménagements et le "garde-meubles". Une maison centenaire, une vraie curiosité qu'il fallait pouvoir observer en semaine lorsque le portail était ouvert.
A l'époque de leur construction, ces bâtiments faisaient figure d'avant-garde architecturale car les entrepôts étaient constitués d'éléments modulaires en béton vibré, une technique alors récemment mise au point par l'ingénieur Freyssinet. En outre, les bâtiments utilitaires - à base de briques, de béton et de fer - incorporaient d'inédits monte-charges qui rendaient l'ensemble très fonctionnel.
En 2004, la famille Odoul passe la main au leader de la profession DEMECO et cherche à valoriser au mieux ce fabuleux patrimoine immobilier ancré dans ce petit coin du 19ème arrondissement.Le promoteur immobilier Paris-Ouest rachète l'ensemble à la famille Odoul, et monte un projet visant à transformer la "forteresse rouge" en un immeuble d'habitation de standing, sur un concept à la mode : le loft. Le programme, qui sera dénommé LOFT 19, comportera donc 30 lofts et 2 locaux d'activités.
Dans le quartier, les habitants ont toujours cru que les bâtiments Odoul étaient inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et qu'ainsi le promoteur n'aurait pas les coudées franches. Mais, fin 2005, les bâtiments tombent un à un, faisant douter qu'ils aient été quelque peu protégés ou classés. Renseignements pris, les habitants du quartier découvriront que les bâtiments ne sont pas classés ... seules quelques façades le sont.
L'intervention de la Mairie d'arrondissement et du conseil de quartier va permettre de préserver l'essentiel : le grand immeuble en briques rouges de l'Architecte Lodz.
Les travaux de l'ambitieux programme Loft 19 dureront deux ans et génèreront beaucoup de nuisances pour les riverains ... à telle enseigne qu'une maisonnette classée s'effondrera durant le chantier. Elle sera gommée du paysage...
Aujourd'hui, les acquéreurs de ces splendides lofts sont bels et bien installés. Les plus jolis lofts de 100m² et plus, situés dans les étages supérieurs, ont trouvé preneurs pour un million d'euros. C'est dire combien cette réalisation participe à "l'embourgeoisement" général de Belleville, dont seuls les immeubles sociaux de la rue Rébeval semblent maintenant pouvoir garantir à terme le maintien de la mixité sociale de ce secteur.Alors Odoul : heureux Lofts ? Peut-être, à moins que ce ne soit "Oh douloureux lofts" !
Tags : rue, logement, industriel
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Commentaires
1François ClercVendredi 1er Février 2008 à 15:46La cata
Suis passé recemment dans le secteur : les lofts empilés sur 10 etages : non merci pas pour moi. De toute façon à une brique d'euros je suis pas preneur..
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Bonjour, Je viens de lire votre article avec beaucoup d'attention et de plaisir car je suis l'un des bobos nouvellement installés. Je tenais juste à vous apporter une petite précision quant aux surfaces des lofts des derniers étages, les prix sont proches de la réalité, par contre, il convient de doubler les surfaces. 180 et 200 m2 (ce qui divise d'autant le prix du m2....). Pour clore le volet historique, la Mairie est sur le point de valider le futur nom du Passage nouvellement créé: Villa Lodz. Merci pour ce blog. Cordialement,