• Ou comment le saccage a été subventionné.

    L'assassinat de Baltard (1971) © Jean-Claude Gautrand

     

    Sous les pioches d'Haussmann c'est tout un pan de Paris, celui de Balzac et d'Eugène Sue, qui va disparaître. Est-ce regrettable ? Peut-être moins que le saccage des dernières décades qui a défiguré Paris et qui sévit encore...

    Car après Haussmann, le massacre reprend dans les années 50-60. Et Georges Pillement dans son ouvrage "Paris poubelle" nous le décrit en détail, montrant comment le saccage a été subventionné… Ecoutons-le : "Il ne se passe pas de mois sans qu'on démolisse dans Paris plusieurs maisons anciennes qui donnent à la capitale son charme et son pittoresque. Car les spéculateurs ne voient qu'un terrain bien situé et qui sera d'un bon rapport lorsque la demeure ancienne sera démolie et qu'on aura élevé sur son emplacement un immeuble d'habitation qu'on vendra par appartement. Ces promoteurs ont d'excellents amis dans les administrations, qui leur facilitent les autorisations et leur versent les subventions qui leur permettront de mener à bien leur saccage."

    On n'a que trop démoli dans Paris, il faudrait désormais que toutes les constructions anciennes qui ont jusqu'ici échappé au massacre soient enfin préservées si l'on veut garder quelque chose de l'atmosphère qu'on y respirait il n'y a pas encore si longtemps. Mais bien des rues l'ont déjà totalement perdue.


    >> Paris Poubelle.

    >> A lire: "Paris poubelle", de Georges Pillement, chez Jean-Jacques Pauvert. Ou comment le saccage a été subventionné.

    >> Marville et son Paris perdu.

     


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  • Chuuuttt !!!

    Chuuuttt!!! - Jef Aérosol - Place Stravinsky (Paris 4ème arrondissement)

     

    Depuis bientôt 35 ans, Jef Aérosol égrène ses pochoirs ou ses collages dans les endroits les plus inattendus de nos villes. En amenant l'art dans la rue, à la portée de tous, il donne l'occasion à chacun de voir différemment son environnement quotidien.

    Pour Chuuuttt !!!, fresque réalisée avec l'aide de la ville de Paris, sur ce mur de 25 mètres de haut, il a pensé à un regard, avec une pointe de malice. Ce portrait, c'est le sien, qui, sur cette place entre Beaubourg, l'Ircam et l'église voisine, n'enjoint pas la foule à se taire mais plutôt à écouter la ville, la musique urbaine, à tendre l'oreille vers la vie, à écarquiller les yeux pour rencontrer et découvrir l'autre.

    Et puis, il ya cette petite flèche, la fameuse flèche rouge de Jef Aérosol, une figure récurrente dans son œuvre et qui s'est peu à peu installée comme une seconde signature. La flèche participe à l'organisation graphique du tableau. Elle indique aussi un sens au spectateur. Un sens, donc à la fois une direction vers où porter son regard et une signification à chercher dans l'œuvre … ou en soi-même.

     

    >> "Urban street", l'art urbain sur Parisperdu

     

     

     


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  • Habiter l'inhabitable.

    Ménilmontant, ilot n°11, rue des Amandiers. (1958)

    Pendant des années, dans la décade 1990-2000, j'ai arpenté les passages, les cours, monté des escaliers branlants d'immeubles vétustes ou d'habitats bricolés aux murs crasseux, aux planchers déglingués. J'ai vu les fenêtres bouchées au carton pour isoler un peu, les branchements électriques dangereux, … l'entassement des choses et des gens. Il ne s'agissait que de non-habitations où l'on rencontre toutes formes de délabrement, de non respect des normes de sécurité, de dangers …

    Cette situation nous vient de loin, du siècle dernier. Alors l'éradication de cette indignité, de cette misère de l'habitat insalubre, a commencé par la démolition pure et simple. Et les rénovations de l'après-guerre vont se faire à coups de grandes barres, dans les quartiers populaires de l'Est de la capitale.

    Au XIXe siècle, la ville ancienne avec ses petites rues, est supposée incompatible avec la salubrité. Avec ses ilots infestés par la tuberculose, elle était perçue comme une forme mortifère. Il va falloir une révolution mentale pour que cette contradiction disparaisse. Et au final, elle est maintenant considérée comme une chose précieuse qu'il convient de conserver le plus possible.

    Peut-être a-t-on enfin trouvé la méthode car aujourd'hui, réparer l'insalubre, c'est digne.

     

     >> A la limite de l'irréel …

    >> Les marchands de sommeil sur Parisperdu.

     

     

     


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  •  Le fabuleux destin des commerces de Montmartre (2/2)

    Au Café des deux Moulins, 15 Rue Lepic, 75018 Paris

     

    Un peu plus bas que le Marché de la Butte, rue Lepic, le Café des deux Moulins, où Amélie était serveuse, ne désemplit pas non plus. Depuis la sortie du film, le bistrot a changé plusieurs fois de propriétaires, sa façade a été repeinte en rose, le tabac supprimé, mais le décor intérieur style "années cinquante" est resté inchangé.

    Si quelques habitués continuent à venir prendre le matin leur café et lire leur journal sur le zinc, ce sont surtout les touristes qui peuplent la salle. Pourtant, une clientèle "plus française" serait souhaitable pour justement "garder l’esprit du film".

    Mais les touristes continuent à affluer de partout, d’Europe, des États-Unis, d’Amérique latine… Et aussi, de plus en plus, d’Asie : Chine, Taïwan et surtout Japon. Parfois, ils entrent juste pour prendre des photos, mais la plupart s’assoient pour commander la "crème brûlée" dont Amélie aimait faire craquer la croûte. Aujourd'hui, elle est servie comme dans le film dans un petit plat ovale. L’hiver il peut s'en vendre entre 200 et 250 par jour ! 

    Les Japonais, sont les premiers fans du film. Ils réservent, par agences, des tables entières. Et leurs réactions sont impressionnantes ! Ils arrivent ébahis, poussent des petits cris, prennent des photos de leurs crèmes brûlées qu’ils tapotent avec leur petite cuillère, avec une jouissance étonnante. On sent que ce film leur procure une grande émotion. Paris est toujours pour eux la ville des amoureux.  

    Aujourd'hui, le cœur de Montmartre bat toujours au rythme de sa petite fée. Si on ne demande plus tous les dix mètres aux habitants du quartier où se situent l’épicerie et le café d’Amélie, c’est parce qu’ils figurent désormais dans tous les guides. Il existe même une application pour smartphone : "Le Montmartre d’Amélie Poulain".

    Depuis toujours, la butte Montmartre a été le lieu de tournages de nombreux films, de Truffaut à Woody Allen, mais aucun n’a fait porter à ce point le regard du monde entier sur elle. Et aucun n’a réussi une telle alchimie entre son héroïne et son décor.

    Le film de Jeunet nous livre une vision de Montmartre largement mythifiée, mais dont on trouve encore des éléments : les vieux Montmartrois cultivent cet "esprit de village", les jeunes "bobos" qui s’y installent aussi. Et si des hordes de Parisiens et de touristes, se sont précipitées dès la sortie du film à l’épicerie Collignon et au Café des deux Moulins, c’est pour retrouver les traces encore présentes, de ce Paris dont ils rêvaient. Et qu’ils recherchent encore…


    >>  Où l'on retrouve Amélie Poulain.

    >> Le fabuleux destin des commerces de Montmartre (1/2)

     


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  • Le fabuleux destin des commerces de Montmartre (1/2)

    Le Marché de la Butte 56 Rue des Trois Frères, 75018 Paris

    Niché sur le flanc de la Butte, au coin de la rue des Trois-Frères, le marché de la Butte a conservé son enseigne de fiction "Maison Collignon", apposée au-dessus de son vrai nom "Chez Abdel". Il a gardé aussi les paniers en osier, les bocaux de bonbons, les fleurs en plastique et les nains de jardin, imaginés par les décorateurs du film. 

    Et les touristes qui s’y arrêtent toutes les dix minutes, s’extasient dans toutes les langues en reconnaissant "l’épicerie d’Amélie" !

    En braquant ses caméras sur cette épicerie, située près de chez lui, Jean-Pierre Jeunet ne savait sans doute pas qu’il allait bouleverser la vie de cette famille marocaine, qui avait ouvert ce commerce en 1973. Car Abdel se dit toujours étonné que tant de monde continue à défiler chez lui. Ils prennent une canette, une pomme, des petits bonbons, histoire d’acheter quelque chose ici. D’autres passent en voiture en criant : "Collignon, tête d’oignon".  

    Aujourd'hui, cette épicerie montmartroise, devenue célèbre dans le monde entier, assume désormais sa double identité : celle de "l’Arabe du coin", ancré dans le quartier depuis près de quarante ans et qui continue à vendre à une clientèle d’habitués du shampooing ou des cacahuètes. Et celle de l'épicerie imaginaire où travaillait Lucien (Jamel Debbouzze), le protégé d’Amélie.

    Finalement, les deux s’emmêlent un peu dans l’esprit d’Abdel, aussi conclut-il avec modestie: "On fait comme dans le film, on continue à avoir des clients fidèles, à livrer à domicile aux personnes âgées ou aux vieux peintres" …

     

    >> Où l'on retrouve Amélie Poulain.


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